Journal d’une confinée #48 : souvenirs, souvenirs
Dimanche 3 mai
Confinement : j48 / ressenti : aussi long que nos souvenirs
Cher corona,
C’est bon, tu peux partir. On vient d’attaquer le rangement des boîtes à souvenirs. Autant te dire qu’on a atteint le paroxysme des trucs à ranger.
Les boîtes à souvenirs, ce sont des boîtes en carton que tu entreposes ici et là et dans lesquels tu as mis en vrac tous les trucs qui ne te servent plus, qui ne te serviront pas, mais que tu ne veux surtout pas jeter. Y’a des moments où tu te demandes vraiment pourquoi tu gardes ce fanion accroché à un bout de ficelle, mais bon, s’il est dans ce carton, c’est qu’il a tenu bon.
La boîte à souvenirs, c’est comme la boîte de Pandore. Attention, celle-là, elle ne contient pas les malheurs de l’humanité, mais plutôt les p’tits souvenirs de notre humanité à nous. Une sorte de boîte de Pandore en positif en fait. On l’ouvre et tout se libère. Et des souvenirs, on en a des tas : des petits et des plus grands, ceux de l’enfance et ceux d’hier, ceux qui reviennent facilement et ceux qu’on a un peu oubliés. Pour moi, les souvenirs, c’est ce que nous avons de plus précieux, ce qui nous reste quand on a tout oublié.
Alors, nous voilà, en plein dimanche pluvieux, assis en tailleur devant la boîte à souvenirs. Nous voilà, en famille, assis à fouiller dans le passé, dans ces babioles qui n’auraient pas d’importance si on en n’avait pas les souvenirs. Les enfants étaient très intrigués par tous ces petits trésors venus pour elles d’un autre siècle. En vrac, on a ressorti ce petit bonhomme des années 80, cette sacrée flûte à bec du collège (« tiens, on l’a retrouvé celle-là »), ces cartes gardées précieusement, ce walkman un peu vintage (« t’écoutais la musique avec ça ? »), ces quelques carnets à dessin griffonnés… Pour nous, ces souvenirs n’étaient pas si vieux que cela, mais on n’a pas osé compter le nombre d’années.
Ça m’a fait marrer de voir leurs têtes amusées. Si elles savaient que les souvenirs, ça me faisait marrer aussi à leur âge. Si elles savaient qu’elles auront un jour la leur de boîte avec quelques bouts de papier et quelques jouets mal rangés.
C’est bon, tu peux partir. On vient d’attaquer la boîte à souvenirs et j’ai le cœur nostalgie.